Plastir N°77 – 06/2025

L’ART EXPÉRIENTIEL : UNE DÉMARCHE TRANSFORMATRICE

Basée à Montréal (QC, Canada), Louise BOISCLAIR, PhD, est conférencière internationale, critique d’art (AICA-Canada), essayiste, peintre et poète. Après une carrière en communication et en vidéo, elle complète un doctorat à l’UQÀM (MAGG) et un postdoctorat à l’UdeM (bourse FQRSC). Récipiendaire de plusieurs prix et bourses, elle signe de nombreux articles en art et en sémiotique, des chapitres de livres et publie, au Québec et en France, cinq essais spécialisés en art immersif, interactif et sonore (2015-2021) suivis d’un recueil de poésie (2024). Depuis 2018 elle a également autoédité cinq cahiers de textimages. Sous la signature LouB, Louise Boisclair approfondit un langage pictural et scriptural, entretissé et libérateur dont les oeuvres sont régulièrement exposées. Comme l’expérience esthétique, elle qualifie l’expérience artistique de démarche transformatrice. Entre essai et poésie, cet article fait suite à une précédente publication dans PLASTIR N°76. L’auteure nous le résume ainsi :  « Le premier mouvement — Collage — rassemble les fondements  de notre démarche transformatrice de l’oeuvre, du corps et de l’expérience esthétique par laquelle la contemplation s’accompagne d’une participation-recherche (Louise Boisclair, L’installation interactive : un laboratoire d’expériences perceptuelles du participant-chercheur (Presses de l’Université du Québec 2015); Art immersif, affect et émotion; Émersivité du corps en alerte; Art écosphérique : de l’anthropocène… au symbiocène, L’expérientiel 1, 2 et 3 (L’Harmattan 2019, 2020, 2021). Ce collage procède d’un ensemble d’oeuvres expérimentées dont les récits cartographient les agencements d’expression, de contenu et d’intervention (Félix Guattari, L’inconscient machinique. Essais de schizo-analyse (Encres-Recherches 1979); Cartographies schizoanalytiques (Galilée 1989). Les affects — forces, qualités et intensités — et les réactions émotionnelles servent de liants à l’événement esthétique qui émerge du diagramme de leur devenir. Le second mouvement — Manifeste — prône une esthétique écosophique en cette période climatique grave. De l’expérimentation des oeuvres à la théorisation du processus en passant par les enjeux soulevés, le corps s’écologise au contact de visions critiques, utopiques ou révélatrices. Inspirés par le symbiocène (Glenn Albrecht, Les émotions de la Terre : des nouveaux mots pour un nouveau monde (Les Liens qui libèrent 2020), les participant.e.s-chercheur.euse.s contribuent au respect du vivant, toutes espèces confondues. Synthétisant 4 essais en arts transdisciplinaires entre expérience esthétique, arts immersifs et interactifs et expérimentation de la plasticité des oeuvres, le présent essai constitue ni plus ni moins qu’un condensé de nos avancées et propositions de recherche sur l’expérientiel, bref un legs.  » Site d’artiste: www.artloub.com 

ARTICULATIONS ART ET SCIENCE(S) : LA MATIÈRE COMME TERRITOIRE DE DIALOGUES PLASTIQUES

Nathalie GUIMBRETIERE est chercheuse postdoctorante en design au Laboratoire d’Ethnologie et de Sociologie Comparative (LESC – CNRS – Université Paris-Nanterre) dans le cadre du PEPR O2R Robotique organique. Elle est également chercheure associée au Centre de Recherche en Design (École Nationale Supérieure de Création Industrielle ENSCI, et ENS Paris-Saclay) et à l’Institut d’Astrophysique Spatiale d’Orsay. Ses travaux portent sur l’intersection entre anthropologie, technologie, design et récits spéculatifs, avec un intérêt particulier pour les imaginaires technologiques. Elle participe actuellement au projet de recherche de la Maison des Humanités Potentielles (PEPR O2R) explorant les trajectoires entre dur, souple et weird dans les écologies technologiques. Frédéric BAUDIN est astronome (eq. Professeur des universités) à l’Institut d’Astrophysique Spatiale, laboratoire de l’université Paris-Saclay. Ses recherches portent sur le Soleil et les étoiles, en particulier la structure interne des étoiles en s’appuyant sur la technique de la sismologie stellaire, ainsi que leur magnétisme. Il s’appuie pour cela sur des observations obtenues par différentes missions spatiales. Il s’investit aussi dans la diffusion des connaissances en dehors de l’université, que ce soit par de la médiation classique auprès du grand public, mais aussi en recourant à une approche artistique dans le but de toucher un public plus large. Leur article examine comment la matière, en tant qu’objet d’étude partagé, devient un territoire de rencontre fertile entre artistes et scientifiques, permettant l’émergence de nouvelles formes de connaissance. Il nous résume leur approche comme suit :  » À travers l’analyse de deux dispositifs que nous avons conçus – Kiruna et L’harmonie des mondes – nous interrogeons la manière dont les processus de matérialisation et de transformation de données scientifiques en oeuvres artistiques génèrent de nouveaux paradigmes épistémologiques. Notre contribution théorique principale consiste à mobiliser le concept de tenségrité de Fuller (1961) comme modèle épistémologique : nous montrons comment, dans les articulations art-science, les tensions entre rigueur scientifique et liberté créatrice ne s’annulent pas mais se stabilisent dans des configurations dynamiques productrices de sens. Cette approche révèle que les pratiques artscience, loin d’être une nouveauté contemporaine, s’inscrivent dans une longue tradition remontant aux chronophotographes du XIXe siècle et aux laboratoires expérimentaux du XXe siècle. L’analyse démontre comment ces dialogues tensègres transforment notre compréhension des savoirs disciplinaires et constituent une écologie de pratiques redéfinissant les frontières entre art et science. « 

CHIFFRE, NOMBRE, ESPACE

Bernard TROUDE est ingénieur en architecture industrielle et en design produit (CNAM Paris) et PhD en sciences de l’art et matériologies et en philosophie des sciences sociales (Panthéon Sorbonne et Descartes Paris V). Son actualité de recherche est actuellement centrée sur mes sciences de fin de vie et d’éthique médicale à l’hôpital touchant à différents domaines des neurosciences, de la physiologie et de la psychologie (intuition, perception, compréhension). Il intervient à ces titres régulièrement à l’international : Angleterre, Italie, Tunisie, Maroc, USA et publie régulièrement dans PLASTIR (PSA Éditeur), chez Elsevier-Masson et dans les revues M@gm@ International (Italie) ou TAKTIK (Tunisie). L’auteur s’est focalisé ces dernières années sur l’étude des relations entre philosophie et mathématiques et a publié une suite d’articles (Plastir n°59, N°63, N°65-06/2022) dans cette perspective transdisciplinaire, dont le dernier opus paru dans Plastir 70-09/23) sur l’immatérialité en mathématiques et en philosophie. Ce nouvel article explore les intrications entre la valeur technologico-artistique et l’éthique d’une oeuvre, ainsi que la moralité de l’art, l’éthique de la création, la liberté et la responsabilité de l’artiste. La réflexion de l’auteur y soulève une multitude de questions interconnectées : la démarche éthique peut-elle coexister avec la liberté de l’artiste ? Quels sont les principaux défis éthiques liés à l’intégration de l’intelligence artificielle dans le domaine de l’art biotech et comment les artistes peuvent-ils être préparés à relever ces défis ? Est-ce qu’un artiste a le droit de créer des hybrides et de donner naissance à des chimères coexistant avec les êtres humains, ou de concevoir des êtres vivants-artificiels mi-vivants mi-machines ? Quels dangers encourons-nous en adoptant un réductionnisme et un matérialisme qui réduisent les êtres vivants à de simples objets ou cellules ? Ne sommes-nous pas justement à l’aube de l’art post-humain ?

AUX LIMITES DE LA CONNAISSANCE, LE RÉEL

Alain DEPAULIS est psychanalyste, membre de l’Ecole Freudienne. membre du CIRET, membre de l’UPEMM de Toulouse. Chercheur indépendant. Fondateur de PLURIACT, Atelier de la pluridisciplinarité, en acte, au service de la personne vulnérable. Alain DEPAULIS a été cofondateur d’un service de soins pour enfants en situation de handicap. Ses travaux ont inspiré le projet de clinique en partenariat et forgé le concept de diagnostic en extension, puis de Conscience en extension Ses ouvrages rendent compte de son parcours : Clinique de la demande en consultation infantile, PUN, Nancy, 1993, – Le complexe de Médée. De Boeck, 2003, 2008, – Travailler ensemble, un défi pour le médico-social. Complexité et altérité, en coll. avec Jean NAVARRO et Gilles CERVERA, Préface d’Axel KAHN, Eres 2013, – L’agir pluridisciplinaire, Ethique et réflexivité, en coll. avec Alain MOLAS et Jean NAVARRO, préface de Michel CHAUVIERE, L’Harmattan, 2021, – Naissance de la transdisciplinarité, préface Pascal ROGGERO, précédé d’échanges avec Edgar MORIN, L’Harmattan, 2024. Il argue comme prétexte à la genèse de son texte qu’avec l’accélération du dérèglement climatique, la désintégration de notre monde et l’anéantissement de notre espèce deviennent plausible. La nécessité d’imaginer un méta-système, capable de traiter des problèmes insolubles avec les clefs des systèmes passés, s’impose. Le rêve d’une mutation intellectuelle (Bachelard), voire d’une métamorphose (Morin) ou encore d’une révolution humaine (Nicolescu) ne sont plus l’apanage de penseurs éthérés. Dans leurs pas, la prometteuse galaxie de la transdisciplinarité vient ouvrir des pistes propres à repenser le rapport de l’homme au monde. Et pourtant ça résiste ! Pourquoi est-il si difficile d’assumer la complexité du monde ? Se profile alors comme obstacle au projet transdisciplinaire la question du réel.

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